Que faire si les pensions alimentaires ne sont pas payées ?
Les services de recouvrement de pensions alimentaires
Il arrive trop souvent que les pensions fixées dans les jugements ne soient pas payées (ou pas entièrement ou pas régulièrement). Les données statistiques sont maigres.
On sait cependant que 98% des personnes qui s’adressent aux institutions d’aide au recouvrement de pensions alimentaires sont des femmes et qu’il y a en moyenne 8’000 dossiers ouverts (environ 300 nouveaux dossiers par année).
Ces éléments ressortent d’un rapport fait en mai 2011, lequel a finalement abouti à l’adoption d’une Ordonnance fédérale sur l’Aide au recouvrement des créances d’Entretien du Droit de la Famille (OAiR) qui a permis d’harmoniser les aides et la pratique en la matière. La lecture du rapport donne beaucoup de détails pratiques et concrets.
Aider les personnes à récupérer leur créances résulte de l’application de l’Ordonnance fédérale. Faire l’avance des fonds est cependant de la compétence cantonale de sorte qu’il y a inévitablement des différences dans les conditions des avances financières qui peuvent être obtenues, en fonction de la législation cantonale.
Chaque canton a donc mis sur pied un service spécifique qui avance – à certaines conditions – le montant non payé de pensions alimentaires décidées dans un jugement.
Le principe est tiré du Code civil (articles 131 al. 2 CC [pension entre (ex-)époux] et 293 al. 2 CC [pension due pour des enfants]) et les cantons sont libres de décider à quelles conditions leurs services peuvent faire des avances sur les contributions d’entretien qui sont dues.
Comme chaque canton décide des conditions de l’aide qui peut ainsi être apportée, il existe de très grandes différences pratiques dans le traitement de ce type d’aide.
Ainsi, c’est la collectivité publique du canton qui fait l’avance des montants qui vous sont dus et qui se charge ensuite d’essayer de les récupérer auprès de celui/celle qui doit payer ces contributions d’entretien.
S’il s’agit de contributions / pensions dues par un débiteur à l’étranger, le service cantonal de recouvrement de pensions alimentaires s’adressera à l’autorité centrale à Berne (l’Office fédéral de la Justice) qui interviendra pour faire payer le débiteur domicilié à l’étranger, en utilisant notamment la Convention internationale permettant de faciliter le recouvrement de pensions alimentaires (voir ici).
L’Office fédéral de la Justice ne traite pas directement avec des particuliers.
Il faut s’adresser au Service du domicile de celui / celle qui doit recevoir les pensions (voir les adresses ici).
Cela étant, si le débiteur est domicilié dans un pays qui n’a pas ratifié la Convention internationale, les chances de pouvoir obtenir un résultat concret sont particulièrement minces.
Les avances sur pensions alimentaires
Ce système présente plusieurs avantages importants :
- D’une part, vous n’avez pas à « faire la chasse » de celui/celle qui vous doit des contributions d’entretien et c’est le service cantonal qui se chargera d’aller récupérer les montants auprès de celui/celle qui les doit. Vous êtes ainsi assuré(e) de recevoir, très régulièrement, des avances de ces services.
- Le deuxième grand avantage est que ces avances n’ont – en général – pas à être remboursées. Par conséquent, même si le Service cantonal de recouvrement des pensions alimentaires n’arrive pas effectivement à faire payer le débiteur, vous n’aurez pas à rembourser les avances faites.
Vous avez par conséquent tout intérêt à vous adresser à ce type de service dès que vous rencontrez des difficultés dans le paiement des contributions d’entretien qui vous sont dues.
Les désavantages de ce système sont essentiellement les suivants :
- Vous ne pouvez pas obtenir d’aide du Service si vous n’êtes pas déjà au bénéfice d’un jugement exécutoire. Si vous n’avez pas encore de jugement exécutoire, il faut s’adresser aux services sociaux ordinaires.
- Les avances ne sont en principe faites que pour les paiements à venir.
- Chaque service cantonal a ses propres conditions.
- Tous limitent le montant maximum des avances (qui peut par conséquent être inférieur au montant dû chaque mois).
- La plupart tiennent compte du revenu et/ou de la fortune du bénéficiaire des pensions.
- Certains arrêtent l’avance si le débiteur est reconnu insolvable ou s’il part à l’étranger.
- Certains cantons n’offrent ce type de service que si vous êtes domicilié dans le canton depuis une certaine période, d’autres n’imposent aucun délai.
- Le système genevois ne permet le remboursement d’avances que pour une période limitée de 36 mois maximum.
L’entrée en vigueur de l’Ordonnance devrait mettre un peu d’ordre :
Le Service demande au créancier (celui/celle qui doit recevoir les pensions) de lui céder votre créance (art. 10 al. 2 OAiR) et de vous abstenir formellement d’entreprendre vous-mêmes des démarches pour récupérer votre créance. A priori, cette exigence est légitime car c’est sur la base de cette cession de créance que le service va pouvoir de son côté agir contre le débiteur (celui / celle qui doit payer). La cession a cependant un effet pervers car, puisque vous avez cédé votre créance, vous ne pouvez plus la faire valoir vous-même, s’agissant en particulier :
- des montants excédant ceux que vous pourriez recevoir du Service
- des arriérés de pension non encore payés
- voire le dépôt d’une plainte pénale
Il faudrait donc veiller à ne céder la créance que pour la période à venir et que pour les montants qui seront avancés par le Service de recouvrement des pensions alimentaires de manière à pouvoir tenter de récupérer les arriérés, les montants qui dépassent les avances (le jugement accorde plus que les avances que le Service peut vous faire) ou d’agir au pénal.
Mais ce n’est pas toujours facile de pouvoir obtenir l’accord du Service pour la cession de créance limitée en ce sens.
L’aide apportée par les Services d’avance et de recouvrement de pension alimentaire est gratuite lorsqu’il s’agit de pensions pour les enfants. Lorsqu’il s’agit d’avance de pensions pour un adulte (ex-conjoint), certains cantons demandent quelques émoluments. Lorsque le Service d’aide et de recouvrement de pensions alimentaires doit payer des frais de poursuite ou de mainlevée, ces frais doivent être remboursés.
Il n’est pas nécessaire de consulter un avocat. Il suffit de remplir des formulaires et d’avoir une copie du jugement fixant les pensions.
A noter que le Service peut informer l’institut de prévoyance du débiteur (ou la banque / l’assurance de libre passage) qu’il est en retard dans le paiement de ses pensions depuis plus de 4 mois (art. 13 et 14 OAiR). L’institut de prévoyance (ou la banque / assurance de libre passage) doit alors informer le Service si le débiteur cherche à recevoir des prestations ou un capital LPP (art. 40 LPP et 24 f LFLP) et bloquer les fonds pendant 30 jours, ce qui permet au Service d’agir, notamment en demandant le séquestre des avoirs et le paiement en sa faveur.