Tableau de l’entretien convenable de l’enfant
Lorsqu’une procédure concerne un ou des enfant(s) mineur(s), la loi exige qu’il soit fourni un tableau de l’entretien convenable (art. 301a CPC).
Car il faut toujours partir des coûts réels de l’enfant – et en tenir compte – pour décider du montant de la pension due (5A_454/2017, Consid. 7.1.2).
Le montant maximum de la pension pour l’enfant est celui de la couverture de la totalité des coûts réels de l’enfant.
Car une pension qui dépasserait le montant des coûts réels de l’enfant serait en réalité un financement indirect de l’autre parent. Or, la pension pour enfant est pour subvenir aux besoins de l’enfant, pas pour financer indirectement l’autre parent (5A_468/2023, Consid. 6.3.2 et ATF 147 III 265, Consid. 7.4).
Il faut donc produire un tel tableau lorsqu’un ou des enfants mineurs sont concernés, que ce soit dans une procédure de divorce, de séparation (MPUC), de liquidation du partenariat, de modification d’un jugement (lorsqu’il s’agit de modifier une pension pour enfant) ou une convention relative aux enfants de parents non mariés.
La pratique exige un tableau par enfant et des montants mensuels (et non annuels).
Vous devez donc nécessairement remplir le tableau de l’entretien de l’enfant (inclus dans les outils du site).
La nécessité de produire le tableau de l’entretien convenable résulte des éléments suivants :
- D’abord, c’est ce qui est exigé par la loi !
- Le tableau permettra au Tribunal de mieux apprécier le montant de la pension pour l’enfant (que représente ce montant par rapport au coût total de l’enfant ? Comme le parent payeur doit faire passer l’intérêt de l’enfant avant toute autre considération, le Tribunal pourra donc augmenter le montant de la pension si la part qu’il représente dans le coût total n’est pas jugée suffisante (tout en laissant au parent payeur la jouissance de son minimum vital)).
- Le tableau permettra par ailleurs de déterminer le montant de l’éventuelle pension de prise en charge (dans la mesure où l’autre parent n’a pas les moyens financiers suffisants pour ses propres frais de subsistance, qu’il/elle a réduit son taux d’activité ou n’a pas d’activité professionnelle, qu’il/elle n’a pas l’obligation de travailler) et qu’on ne puisse pas retenir à son encontre un revenu hypothétique.
Quel est le coût de l’entretien convenable d’un enfant ?
C’est précisément le but du tableau : estimer le coût de l’entretien convenable.
L’entretien convenable d’un enfant dépend manifestement de plusieurs facteurs, notamment de son âge, tant il est évident qu’un adolescent de 14 ans coûte évidemment plus qu’un enfant de 4 ans.
Les besoins essentiels de chaque enfant sont cependant faciles à déterminer. Il s’agit des frais fixes, en particulier :
- Le coût de son logement. Le plus simple est de déterminer concrètement quel est le coût d’une pièce. Il suffit de prendre le loyer mensuel + les charges, divisés par le nombre de pièces, et on a ainsi le coût concret d’une chambre par mois. Si deux enfants dorment dans la même pièce, on met donc la moitié du coût d’une pièce dans le tableau de l’entretien convenable de chaque enfant. Si on est propriétaire, le coût d’une pièce est celui des intérêts hypothécaires + les charges mensuelles courantes, divisés par le nombre de pièces. En cas de garde alternée, faire le calcul du coût d’une pièce de l’un et de l’autre logement, puis faire une moyenne des résultats (5A_583/2018). Les Tribunaux acceptent également des coûts de logement théoriques, exprimés en pourcentage du loyer (respectivement des intérêts hypothécaires) et des frais courants. Les pourcentages varient très fortement d’un jugement à l’autre, sans explication particulière. Cette méthode est donc très aléatoire et il vaut mieux calculer concrètement. Exemples :
- 15 % du loyer et des charges pour un enfant (5A_874/2015)
- 15 % pour deux enfants (5A_803/2021)
- 20 % pour deux enfants (5A_952/2019)
- 40 % pour deux enfants (5A_234/2011)
- 45 % des intérêts hypothécaires pour trois enfants (5A_271/2012)
- Les frais de nourriture et d’habillement. Certes, ce poste dépend du style de vie des parents et donc, de leurs revenus. Mais même dans une famille très aisée, l’enfant ne mange pas que des homards et du caviar à la cuillère tous les jours et ne s’habille pas que chez Dior… S’agissant du minimum à prévoir pour les frais de nourriture et d’habillement, se rappeler que le strict minimum vital d’un enfant, selon les normes des Offices des Poursuites, est de 400.- par mois pour un enfant de moins de 10 ans et de 600.- par mois pour un enfant de plus de 10 ans. Et se rappeler qu’avec de tels montants, l’enfant ne mange pratiquement que des pâtes sans sauce et s’habille chez Emmaüs !
- Les primes d’assurance maladie. Il s’agit là d’un coût fixe qui n’est pas négligeable et qui est essentiel.
- Les frais de prise en charge de l’enfant par des tiers. Il s’agit typiquement des frais de crèche, maman de jour, garderie, baby-sitter, réellement payés à des tiers (donc pas les frais de grands-parents qui s’occupent gratuitement de leurs petits-enfants, ni les frais de crèche théorique plus importants que les frais réels : 2C_849/2021).
- Les frais d’écolage et de transports indispensables (abonnement transports publics au minimum, frais de vélo, de moto, etc.).
- Les frais médicaux non couverts (par exemple dentiste, lunettes) et/ou le montant de la franchise.
- Les frais particuliers liés à un handicap de l’enfant.
Ainsi, au total, ces frais (et donc les coûts) fixes concernant l’entretien de l’enfant sont au minimum de 1’200.- à 1’500.- par mois.
Voir par comparaison et pour information les liens suivants (qui ne comprennent en général pas les coûts de logement, voire les primes d’assurance-maladie qui doivent néanmoins être inclus dans le tableau de l’entretien convenable) :
Swiss Life : Melanie Schell, « Combien coûte un enfant ? » (2023)
Swissinfo : Samuel Jaberg, « Pour élever deux enfants en Suisse, comptez au minimum un demi-million de francs » (2019)
UBS : « Le guide des familles »
Pour information, voici les coûts usuels pour un enfant tels qu’ils étaient estimés en Valais en 2010 : Coûts Usuels Enfant (2011)
Aux coûts fixes, il faut ajouter les coûts variables et particuliers (coûts liés à la pratique d’un sport, cantine à l’école, activités parascolaires, leçons de piano ou de danse, vacances, frais de téléphone et internet (pour les ados !!), argent de poche, etc.
Pour un exemple, voir 5A_468/2023 (école publique ou privée ? frais de garde par un tiers, vacances et loisirs).